15.6.07

Avez-vous lu Emmanuel Bove?


Emmanuel Bove et sa fille Nora au jardin
du Luxembourg à Paris, vers 1924


Je tenais à rendre hommage à l'écrivain et journaliste Paul Morelle qui vient de disparaître (voir l'article du Monde ci-dessous). Je l'avais rencontré lors de mes recherches sur l'écrivain Emmanuel Bove qu'il avait défendu dès les premières rééditions en 1977. Alors journaliste littéraire au Monde, il avait publié dans le "Monde des livres" un article mémorable intitulé : "Avez-vous lu Emmanuel Bove?" Ce ne fut pas une mince affaire : "Quand j'ai annoncé à la conférence de rédaction que je voulais faire un article sur Emmanuel Bove, tous m'ont regardé avec des yeux ronds..." Finalement, l'article paraîtra en première page du "Monde des livres" le 3 décembre 1977.

NECROLOGIE

"L'écrivain et journaliste Paul Morelle, mort à La Seyne-sur-Mer (Var) à l'âge de 89 ans, faisait partie de la première équipe du "Monde des livres" dirigée par Jacqueline Piatier, puis par François Bott. Engagé en 1969, il y resta jusqu'à sa retraite, en 1980. Ceux qui l'ont connu, promenant sa silhouette un peu voûtée, pipe à la bouche, dans les anciens locaux du journal, rue des Italiens, se souviennent de sa voix éraillée, de son humour un peu caustique et de sa grande liberté d'esprit.Né dans l'Oise, Paul Morelle milite très jeune à la SFIO et côtoie l'élite intellectuelle de l'époque - il fut notamment l'ami de Victor Serge. "Ce furent mes "universités"", dira-t-il. Après un engagement résolu dans la Résistance qui lui vaudra d'être plusieurs fois décoré, il commence sa carrière de journaliste à Franc-Tireur, puis à Oran-Soir. De 1948 à 1964, il dirige le service culturel de l'ancien Libération. Critique de théâtre, il se lie d'amitié avec Jean Vilar, Jean-Louis Barrault, Gérard Philipe... A 61 ans, en 1978, il publie son premier roman, La Douceur de vivre (éd. Le Sagittaire), puis, deux ans plus tard, un second, L'Embusqué (Stock). Dans ces deux livres, il se fait le chroniqueur alerte et peu conformiste des époques qu'il a traversées, celle du Front populaire puis celle de la guerre.En 1984, c'est à Aragon qu'il s'en prend, dans un pamphlet virulent, Un nouveau cadavre, Aragon (La Table ronde). Ni la vie ni l'oeuvre de celui qu'il nomme "l'homme-caméléon" ne trouvent grâce à ses yeux. "La mort n'est pas une excuse", avance-t-il, citant Georges Darien, pour justifier son geste iconoclaste. A la même époque, Paul Morelle relance le Prix du roman populiste, qui, créé en 1931, avait eu ses heures de gloire, avant de tomber en désuétude au début des années 1960."

Patrick Kéchichian, le Monde du 7 juin 2007